Cass. com., 19 octobre 2010, n° 09-69.203
par Lucien Castex le 7 novembre 2010

Ubi lex non distinguit ; la caution, dirigeant de la société cautionnée, peut invoquer le caractère manifestement disproportionné de son engagement.

Article L341-4 :

« Un créancier professionnel ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation. »

Ci-dessous un extrait de l’arrêt

« LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 11 juin 2009), que la société Komelec (la société) a ouvert dans les livres de la Caisse d’épargne et de prévoyance Ile-de-France Paris, dénommée aujourd’hui Caisse d’épargne et de prévoyance Ile-de-France (la caisse), un compte courant, pour les besoins de son activité et a conclu le 19 juillet 2005 une convention d’échange Datalis permettant l’échange de données informatiques par télétransmission, notamment l’émission et le règlement de lettres de change ; que le même jour, M. X... (la caution), s’est rendu caution solidaire des engagements de la société dont il était le gérant, à concurrence de 180 000 euros ; que la société a été mise en redressement judiciaire le 20 février 2006 ; qu’après avoir déclaré l’ensemble de ses créances pour un montant global de 136 618,26 euros, la caisse a, les 21 avril et 3 mai 2006, assigné en paiement la caution ainsi que la société Acceldis, au titre d’effets de commerce revenus impayés ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la caisse fait grief à l’arrêt d’avoir rejeté sa demande de condamnation de la caution à lui payer diverses sommes en raison du cautionnement du 19 juillet 2005, des dettes de la société, alors, selon le moyen :

1°/ que l’article L. 341-4 du code de la consommation, même s’il emploie des termes généraux est situé dans le code de la consommation, et dès lors ne peut s’appliquer à la caution dirigeant personne physique, dont la dette de caution est une dette professionnelle ; qu’en décidant le contraire, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

2°/ que pour apprécier la disproportion du cautionnement, la cour d’appel doit tenir compte des profits que la caution dirigeante peut raisonnablement escompter de l’opération cautionnée ; qu’en admettant en l’espèce qu’il y avait disproportion, sans rechercher comme elle y était invitée, si la caution ne pouvait compter voir ses revenus croître compte tenu de l’opération cautionnée, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 341-4 du code de la consommation ;

Mais attendu, d’une part, que la cour d’appel a fait exactement application de l’article L. 341-4 du code de la consommation, dès lors que le caractère de caution profane ou de dirigeant averti est indifférent pour l’application de ce texte ;

Attendu, d’autre part, qu’ayant retenu dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation que le cautionnement était au jour de sa signature manifestement disproportionné par rapport aux facultés contributives de la caution dont le patrimoine ne lui permettait pas, au jour où elle a été appelée, de faire face à son obligation envers la caisse, la cour d’appel, qui n’était pas tenue de procéder à une recherche inopérante, a légalement justifié sa décision ;

D’où il suit que le moyen n’est fondé en aucune de ses branches ;

Et sur le second moyen :

Attendu que la caisse fait grief à l’arrêt d’avoir rejeté ses demandes de condamnation présentées à l’encontre de la société Acceldis, alors, selon le moyen, qu’en vertu du principe de l’interdiction de se contredire au détriment d’autrui, la société Acceldis, qui a signé la transaction par laquelle la société renonçait aux effets qui avaient été émis en banque, et qui l’a admis dans ses conclusions de première instance, est irrecevable à soutenir dans la présente espèce que lesdits effets n’existaient pas ; que dès lors, en décidant que la société Acceldis pouvait malgré tout se prévaloir du fait que la caisse ne produisait pas les effets dont elle se prévalait, la cour d’appel a violé le principe susvisé ;

Mais attendu que l’argumentation selon laquelle la caisse ne produit pas les lettres de change dont elle se prévaut n’est pas incompatible avec l’invocation de la transaction conclue le 13 décembre 2005 entre les sociétés Acceldis et Komelec aux termes de laquelle cette dernière renonce aux effets émis et remis en banque ; que le moyen n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ; »

{ Commentaires fermés }

Luciencastex.com v6 '2011 | Mentions légales